mercredi 1 août 2012

Fil rouge, fil ténu de ma pensée, tu roules sur ma langue du bout des cils sans oriflammes sans vague-à-l'âme, crache crache crache tes poumons, c'est l'air marin ! Les voix dans ma tête, ça me bouscule, ça me bouleverse, ragoût du caniveau, fétide coquille d'âme. Crétin tombeur, oracle des ouragans, fils de Satan, tu dardes tes yeux jaunes sur mes gestes infantiles, mes colères soudaines, ta voix qui rentre par la fenêtre « Avez-vous vu la lune ? » Je m'en allais par les dunes gonflée d'allégresse, le vent flatteur cageolait les brindilles, leur mépris bien gardé au creux des lames – de vent, encore ces bourrasques folles, et pourtant : ouvrez la fenêtre, libérez les oiseaux, cri de liberté qui ne m'a plus quittée. L'orgueil des rois n'a pas la mer à boire Et depuis une bouteille Paris se marre Ça se bouscule aux portillons de la faiblesse aux heures de pointe du désespoir, toutes les rues la nuit sont emplies de gens étranges qui bougent les murs ou courent en riant, emplies de langues étrangères qui chantent au-dessus de la Seine, d'ivrognes désincarnés qui ont perdu leur billet de loterie, et d'amoureuses transies – transies de froid, des jeunes filles qui se tiennent par la main, ornées de grâce et de rudesse, sans faire d'ombrages aux vagabonds. Ah, le Paris des temps anciens ! Quand l'on trouvait encore la plage sous les vieux pavés... Ah ma folle jeunesse ! Ils ont oublié la grève en bétonnant nos rues, et elle ne demeure plus qu'un espoir perdu, une promesse au bout du phare, dans la brume. Sons étranges et familiers, qui emplissent le palier, gravitent en mon for, s'emparent de notre inertie et en volutes de fumée tout s'évapore, votre tension et nos mystères. mais la nuit, ombre grandissante qui a pris possession du jour, a plus d'un tour dans son sac, et c'est seulement quand, silhouette ébranlée elle traîne sa solitude, que les capteurs d'aurore peuvent la saisir, tout en émoi et dérobée, dépouillée de blasphème. Outrage ô nuit ! Que n'aurais-je donné pour exacerber tes infamies, toi la cruelle ennemie de mes désirs. (Décembre 2011)